Tadjouah les Bains [Solioz]
Édition
Éditeur : divers
Lieu : s.l.
Année : s.d.
Description
État du document : bon
Références
Réf. Biblethiophile : 004757
Réf. UGS : 4101000
COLLATION :
carte.photo, bon état.
En savoir plus
En raison de la scène et des légendes, cette singulière carte postale ancienne mérite de s’y attarder.
L’impression au verso est en allemand : « zu, in, Wohnung (Strasse und Hausnummer) ». Elle est envoyée à M. V. Solioz, Ingénieur à Delémont en Suisse où elle arrive le 10 novembre 1902.
Le recto est une image représentant cinq natifs et deux Européens. Difficile à dire si les natifs sont de Tadjoura. À en croire la note manuscrite, l’Européen de gauche est l’oncle Victor Solioz , enchanté ! Son comparse n’est pas nommé mais semble tout aussi fier de figurer sur la photo.
Sous la photo, la mention « Tadjouah les Bains » fait office de légende.
En bas, à gauche, un certain A. Conseillé donne des nouvelles de sa famille et de lui-même avant de transmettre ses « Sentiments très respectueux ».
En vis-à-vis, un certain Charles confirme que « les nouvelles sont toujours bonnes » et qu’« une lettre suit ». À Monsieur Solioz, il envoie, lui, ses « civilités respectueuses ».
Le portail des manuscrits numérisés provenant de bibliothèques et d’archives suisses met en ligne une lettre de Victor Solioz (1854-1921) au géologue Louis Rollier (1859-1931)[1]. Datée à Delémont le 7 décembre 1901, à l’entête de la maison Arthur Kopel de Berlin, elle laisse entendre que Solioz a cherché à rencontrer Rollier à Zürich puis à Lausanne pour l’ « examen de pierres, minéraux etc, rapportées de la Baie de Gubet Kahrab, Côte des Somalis ». Solioz ajoute : « Comment je dois soumettre mon rapport sous peu, à Paris, je n’avais pas de temps à perdre », ce qui explique qu’il se soit adressé à Mr Golliez.
Victor Solioz est un ingénieur, d’origine grisonne, habitant Delémont. En août 1903, il est chargé « de la construction d’un chemin de fer à voie étroite de 570 kilomètres dans la région des mines de cuivre d’Otou » en Afrique occidentale allemande[2] qui lui vaudra, trois ans plus tard, d’être décoré de l’Ordre de l’Aigle Rouge par l’empereur d’Allemagne, Guillaume II[3]. De ce séjour en Namibie, Solioz ramène une collection d’objets ethnographique qui se trouve actuellement au Musée d’Histoire de Berne[4].
À l’instar de certains pays européens, la Suisse s’interroge aussi sur son passé colonial. L’exposition « Colonialisme – Une Suisse impliquée » tenue au Musée national e Zürich du 13 septembre 2024 au 19 janvier 2025 apporte des éléments de réponse. Dans le « dossier d’accompagnement à destination du personnel enseignant », le rôle joué par les experts prend le cas de Solioz en exemple :
Dès le milieu du XIXe siècle, plusieurs experts suisses travaillent au service des puissances coloniales. Des géologues cherchent du pétrole, des ingénieurs construisent des ponts, des fonctionnaires perçoivent des impôts. Leur savoir-faire est mis au service du développement et de l’administration des colonies.
Les Suisses sont employés, entre autres, dans l’État indépendant du Congo et leurs connaissances contribuent au pillage du pays. Dans le Sud-Ouest africain allemand, l’actuelle Namibie, l’ingénieur Victor Solioz (1857–1921) construit une ligne de chemins de fer destinée au transport de minéraux. L’opposition locale à cette ligne est réprimée par une violence brutale, qui culmine dans un génocide.
Quel était le mandat de Solioz dans la Côte des Somalis ? S’est-il réellement rendu à Tadjoura ?
Pour y répondre, il faudrait consulter les archives. Selon Bernhard Gardi, Solioz ne serait pas seulement intervenu en Namibie et au Cameroun mais également en Ethiopie[5]. L’information reste à confirmer.
Biblethiophile, 24.12.2025
[1] E-manuscripta.ch, consultée le 24.12.2025.
[2] Dépêche de la Matinée publiée dans Le Français du 21 août 1903.
[3] Dépêche du Monde entier publiée dans L’Eclair du 05 juillet 1906.
[4] Anonyme, « Collectionner en pleine guerre », consultée le 24.12.2025.
[5] Gardi, Bernhard, « Die Afrika-Sammlung der Abteilung für Völkerkunde im Bernischen Historischen Museum »,Jahrbuch der Geographischen Gesellschaft Bern, Band 54, 1980, p. 48.
